MONTRÉAL – L’incertitude commerciale causée par les droits de douane américains, réels ou appréhendés, a ébranlé la confiance des consommateurs, au point que la croissance du volume au port de Vancouver en souffrira, a estimé son directeur général.
Peter Xotta, PDG de l’Administration portuaire Vancouver Fraser, prévoyait que le volume de marchandises en transit au plus important port maritime du pays augmenterait de quatre à cinq pour cent cette année, après une année 2024 record. Mais il souligne maintenant que «l’incertitude accrue» freine le climat économique actuel.
«Ne vous y trompez pas: de tels droits de douane font mal à tout le monde, a déclaré lundi M. Xotta lors d’une entrevue téléphonique. Cette incertitude entraîne ensuite des retards dans les décisions, qu’il s’agisse d’investissements, de plans d’exploitation ou d’autres formes d’investissement dans les ressources humaines et la capacité de production.»
Le président américain Donald Trump a annoncé la semaine dernière des droits de douane de 25 % sur la plupart des importations canadiennes, pour ensuite les suspendre de nouveau sur les biens et services couverts par l’accord de libre-échange nord-américain jusqu’au 2 avril. Des droits de douane de 25 % sur l’acier et l’aluminium sont toujours à l’ordre du jour pour mercredi.
Le Canada a riposté en imposant des droits de douane de 25 % sur 30 milliards $ de biens américains importés, et une deuxième vague est prévue pour le mois prochain sur d’autres produits d’une valeur de 125 milliards $.
La Banque du Canada et de nombreux économistes ont prédit qu’une guerre commerciale prolongée déclencherait une récession au nord de la frontière.
«Nous nous attendons à ce que cela ait un impact sur le PIB global, et donc sur la confiance des consommateurs, a déclaré M. Xotta lundi. Le mal est déjà fait.»
Malgré l’instabilité provoquée par le déploiement cahoteux des droits de douane du président Trump, M. Xotta estime que l’année à venir s’annonce «assez positive pour le Canada» – mais pas autant que si une guerre commerciale n’avait pas lieu.
Le Canada a connu en janvier et février «une forte croissance», alors que les entreprises se sont précipitées pour expédier des produits et constituer leurs stocks avant les dates annoncées des droits de douane, qui ont changé plusieurs fois depuis que M. Trump a lancé la menace pour la première fois dans les jours qui ont suivi sa victoire électorale en novembre.
Bonne année pour le port
Ce coup de pouce s’appuie sur une année productive sur la côte ouest. Une quantité record de marchandises a transité par le port de Vancouver l’année dernière, une augmentation alimentée en grande partie par la forte hausse des exportations de pétrole albertain rendue possible par l’expansion du pipeline Trans Mountain.
Le fret total du plus important port du pays a augmenté de 5 % d’une année sur l’autre, pour atteindre 158 millions de tonnes en 2024, a indiqué lundi l’Administration portuaire Vancouver Fraser.
Les exportations de pétrole brut ont grimpé de 527 % grâce à l’expansion du pipeline Trans Mountain, qui a commencé ses activités au printemps dernier.
L’infrastructure, qui jumelle un pipeline existant, a presque triplé sa capacité, pour un coût total de 34 milliards $. Le pipeline part d’un terminal de stockage à Edmonton, traverse les Rocheuses avant de serpenter vers le sud-ouest jusqu’à un terminal à Burnaby, près de Vancouver, sur la côte Pacifique.
«Cela a signifié, surtout dans le contexte des derniers mois, une augmentation significative prévue du volume des expéditions d’énergie hors du port», a précisé M. Xotta, qui prévoit que plus de pétrole encore devrait y transiter cette année.
Le trafic de conteneurs a repris en 2024, augmentant de 11 % par rapport à 2023, revenant aux niveaux d’avant la pandémie. Cette hausse est survenue dans la foulée d’une baisse post-COVID, qui avait elle-même suivi une hausse alimentée par la demande de biens de consommation au plus fort de la pandémie. La demande en articles ménagers et en matériaux de construction a entraîné la résurgence des produits importés par conteneurs.
Plusieurs obstacles ont toutefois entravé l’activité portuaire à Vancouver l’année dernière, notamment les conditions météorologiques extrêmes – les incendies de forêt et les basses températures ont immobilisé les trains de marchandises à divers endroits. Mais on souligne aussi les arrêts de travail dans les ports de la Colombie-Britannique et dans les deux principaux chemins de fer du pays.
«Il y a de fait plus de volatilité dans la chaîne d’approvisionnement», a souligné M. Xotta.
Près de 470 000 véhicules importés (un autre record) ont néanmoins été débarqués sur les quais du port de Vancouver l’année dernière, ce qui représente une augmentation de 3 %, alimentée par l’appétit des Canadiens pour les voitures neuves, a souligné l’administration portuaire.
Les expéditions de canola ont augmenté de 23 %, mais les volumes de blé, de loin la plus importante variété de céréales, ont chuté de 10 % d’une année sur l’autre. Les exportations de billots de bois ont chuté de 38 % et les expéditions de minéraux de 21 %; les exportations de charbon ont chuté de 2 % en 2024.
Par contre, un autre type de trafic a atteint un nouveau sommet. Le nombre de passagers des navires de croisière a atteint un record de 1,33 million, soit une augmentation de 7 % par rapport aux 1,24 million de croisiéristes qui ont débarqué dans le port de Vancouver en 2023, la plupart d’entre eux en route vers ou depuis l’Alaska.
Des chiffres comparables sont attendus cette année, a déclaré le PDG Xotta, notant qu’une majorité de ces voyageurs maritimes sont américains.
Article de Christopher Reynolds, La Presse Canadienne, Les droits de douane «ébranlent la confiance», prévient le PDG du port de Vancouver | Affaires | thecanadianpressnews.ca